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L'œil du maître : regarder les Fables de La Fontaine
Article | Littératures classiques | 82 | 3 | 2013-12-01 | p. 275-290 | 0992-5279
L’« ample comédie » des Fables propose à l’observation du lecteur un jeu d’acteurs impliqués dans des situations dramatiques chargées de sens en tant qu’elles reflètent la manière dont les individus se situent dans le monde social. Le lecteur assiste pour ainsi dire aux Fables ; il lit les Fables parce qu’il les regarde et les interprète, parce qu’il voit plus loin et mieux que leurs acteurs dont le point de vue est, à dessein, borné ou biaisé. Le recours au modèle du théâtre est délibéré pour La Fontaine qui l’investit d’un sens poétique fort : la médiation de la mimèsis fabuleuse opère une catharsis politique. La succession des Fables conduit le lecteur à parcourir l’étagement d’une petite société où le regard situe chaque acteur à la fois spatialement et politiquement. Les Fables relèvent proprement de la représentation en ce qu’elles reformulent l’image que l’homme peut avoir de lui-même et conditionnent à nouveau celle qu’il se fait du monde dans lequel il agit. Cet engagement mimétique de la fable permet alors au regard du lecteur de lire le monde avec plus de pertinence.